Les agriculteurs de l’État nigérian de Taraba sont expulsés de terres qu’ils cultivent depuis des générations pour laisser la place à la société américaine Dominion Farms pour la création d’une exploitation rizicole de 30 000 ha. Le projet est soutenu par le gouvernement nigérian et la Nouvelle Alliance du G8 pour la sécurité alimentaire et la nutrition en Afrique. Des agriculteurs de l’État de Taraba refusent de céder leurs terres à un énorme projet de riziculture soutenu par le G8.
Deux ONG nigérianes, l’Environmental Rights Action (ERA)/Friends of the Earth Nigeria (FoEN) et le Center for Environmental Education and Development (CEED), ont visité la zone concernée pour rencontrer les communautés locales et les responsables publics compétents. Elles ont découvert que les terres qui sont cédées à Dominion Farms relèvent d’un système d’irrigation public dont des milliers de familles dépendent pour leurs besoins en nourriture et leurs moyens de subsistance. Les populations locales n’ont pas été consultées sur la transaction avec Dominion Farms et, bien que l’entreprise ait déjà commencé à occuper les terrains, elles n’ont actuellement aucune information sur d’éventuels projets d’indemnisation ou de réinstallation.
Les populations locales sont unies dans leur opposition au projet de Dominion Farms. Elles veulent reprendre possession de leurs terres afin de continuer à produire des denrées alimentaires pour leurs familles et la population du Nigeria.
L’accaparement mondial des terres s’invite dans l’État de Taraba
Au cours des trois dernières années, le ministère fédéral de l’Agriculture et du Développement rural et le ministère fédéral du gouvernement nigérian ont cherché à accroître les investissements directs étrangers dans l’agriculture, dans le cadre d’une stratégie visant à augmenter la production alimentaire nationale. Grâce à cette politique, de vastes étendues de terres agricoles ont été identifiées par le gouvernement pour des projets de grande ampleur entrepris par des sociétés étrangères. Il en résulte un risque accru d’accaparement des terres, un processus dans lequel les communautés locales sont évincées de leurs terres et perdent leurs moyens d’existence et la possibilité de produire leur alimentation.
L’un des projets en cours de développement se situe dans l’État de Taraba, sur une étendue de 38 000 hectares de terres qui ont été initialement acquises par un organisme d’État, l’UBRBDA (Upper Benue River Basin Development Authority) en 1978. En 2012, la société américaine Dominion Farms Limited a signé un protocole d’accord avec le gouvernement de l’État de Taraba et le gouvernement nigérian, pour une concession de 30 000 ha sur les terrains de l’UBRBDA pour la création d’une vaste exploitation rizicole. Le protocole d’accord a été signé sans que le public le sache, et les détails des dispositions ne sont toujours pas connus de la communauté locale de Gassol et des organisations qui ont suivi la transaction.
La Communauté de Gassol et les terrains de l’UBRBDA sont situés sur la berge nord-est de la Taraba, où, depuis longtemps, les populations locales utilisent les terres, en libre accès, pour leurs diverses activités agricoles quotidiennes et la production de leur alimentation. Un talus, qui a été construit par l’UBRBDA pour protéger les terres agricoles des crues de la rivière, longe les terrains sur 8 kilomètres. Ces terrains assurent d’importantes fonctions écologiques et hydrologiques et représentent une source essentielle de revenus pour les agriculteurs de Gassol et d’autres communautés locales. Les agriculteurs de Gassol occupent un ensemble de terres agricoles individuelles à l’intérieur de cette zone, qu’ils ont héritée de leurs ancêtres qui ont été les premiers à s’installer à cet endroit. La communauté compte une population d’environ 40 000 habitants.
En 2010, Dominion Farms a fait son apparition dans la communauté de Gassol en cherchant à se faire attribuer, pour la construction d’une grande exploitation rizicole, des terrains, des ressources en eau, des étangs de pêche et des pâturages utilisés jusqu’alors par la communauté. L’attribution de ces terrains à Dominion Farms va clairement porter atteinte à la capacité des communautés agricoles locales de produire leur alimentation et d’obtenir des revenus. Le projet va également affecter les éleveurs nomades de la zone en perturbant leurs itinéraires et les espaces qu’ils utilisent pour le pâturage du bétail. Il est fortement à craindre que ces communautés seront évincées de leurs terres et perdront leurs moyens de subsistance sans indemnisation suffisante ni réinstallation sur d’autres terres agricoles de qualité.
L’Environmental Rights Action (ERA)/Friends of the Earth Nigeria (FoEN) et le Center for Environmental Education and Development (CEED), ont décidé d’apporter leur soutien aux communautés concernées par le projet de Dominion Farms en mettant en place une mission d’information dans la région pour rencontrer ces communautés et les responsables publics compétents. La visite sur le terrain s’est déroulée du 8 au 13 juin 2014. L’un des objectifs de la recherche était de vérifier comment les agriculteurs locaux sont menacés par l’arrivée de l’entreprise et comment le gouvernement est impliqué dans le processus. Notre principal objectif, cependant, était de recueillir les opinions des agriculteurs de Gassol à propos du projet de Dominion Farms.
Les consultations avec les agriculteurs concernés de la communauté de Gassol ont révélé de graves irrégularités. Les agriculteurs interrogés ont indiqué que seuls les agents du gouvernement et les élites locales ont été consultés. Certains membres de ces dernières ont personnellement approuvé le projet dans leur communauté, malgré la large opposition clairement manifestée par les membres de la communauté. Il est apparu par la suite que les consultations n’ont pas abordé la question de savoir si les communautés locales acceptaient ou non le projet, et sous quelles conditions elles l’accepteraient. Certains agriculteurs concernés ont déclaré que des promesses avaient été faites concernant une indemnisation correcte pour leurs terres, la construction d’écoles, de routes, d’hôpitaux et d’un centre de formation agricole, ainsi que concernant l’embauche de personnel local quand Dominion Farms et les organismes gouvernementaux avaient visité initialement la région, mais qu’aucune de ces promesses n’avait été tenue.
Qu’est-ce que Dominion Farms ?
Dominion Farms Limited est une société enregistrée au Kenya, dont le siège est situé dans l’Oklahoma, aux États-Unis et qui est majoritairement détenue par l’homme d’affaires américano-canadien Calvin Burgess dans le cadre de son « Groupe des sociétés Dominion ». L’entreprise gère une exploitation rizicole controversée dans la zone du Marais de Yala, dans le Kenya occidental. Les agriculteurs locaux y affirment que ce projet a abouti à la perte de leurs terres et de leurs moyens d’existence, et à de graves impacts sociaux, sanitaires et environnementaux pour les communautés touchées.
Il semblerait que la société intervienne au Nigeria par le biais d’une filiale, Dominion Rice & Integrated Farms Limited.
Les activités de Dominion au Nigeria et dans l’État de Taraba sont relativement récentes. En 2012, l’entreprise s’est engagée dans un processus de création d’un grand projet d’exploitation rizicole dans l’État de Taraba, dans le Nord du Nigeria. La société a signé un protocole d’accord avec le gouvernement fédéral du Nigeria, représenté par le ministère fédéral de l’Agriculture et du Développement rural (FMARD) et le gouvernement de l’État de Taraba.
Le projet de Dominion Farms dans le Taraba fait partie d’un accord-cadre de coopération de la Nouvelle Alliance du G8 pour la sécurité alimentaire et la nutrition en Afrique. Dominion Farms a signé une lettre d’intention entre le gouvernement du Nigeria et les pays bailleurs de fonds du G8 qui porte sur un investissement de 40 millions d’USD dans « la culture et la transformation du riz sur 30 000 ha de terres », une « ferme centrale propriété de Dominion », une rizerie et la formation de jeunes Nigérians sur le site kenyan de Dominion. Malgré la rhétorique de la Nouvelle Alliance sur la défense de la sécurité alimentaire, sur le terrain, l’investissement de Dominion Farms a abouti à un accaparement des terres et a une réduction de la résilience des agriculteurs locaux et de leur capacité à produire l’alimentation pour leurs communautés et eux-mêmes. En fin de compte, ce projet met en lumière les problèmes posés par les pressions du G8 en faveur d’une agriculture dictée par les grandes entreprises.
La confiscation par une entreprise d’un système d’irrigation public
Historiquement, le Taraba figure parmi les États créés à partir de l’ancien État de Gongola dans la partie nord-est du Nigeria. L’État a été créé en 1991 et sa capitale est Jalingo. La population est estimée à 2 688 995 habitants et sa superficie totale à 54 473 km2, ce qui en fait le troisième État du Nigéria du point de vue de sa superficie. Il est bordé par l’État du Plateau et l’État du Bénoué à l’ouest et par le Cameroun à l’est.
La majorité de la population du Taraba travaille dans l’agriculture. Ils pratiquent des cultures de rapport comme le café, le thé, les arachides, le sésame, le coton, le maïs, le riz, le sorgho, le millet, le manioc et l’igname, et ils pêchent et élèvent un grand nombre de troupeaux de bovins, d’ovins et de caprins. L’État compte actuellement 16 zones de gouvernement local, l’une d’elles étant Gassol, où se trouve le projet de Dominion Farms.
La zone de gouvernement local de Gassol a une population totale d’environ 244 749 habitants pour une superficie de 5 548 km2. La rivière Taraba traverse la zone et se jette dans la Bénoué, dont le cours suit la frontière nord de la zone. Gassol est doté de terres agricoles fertiles pour la culture du riz, du maïs, du sorgho, du millet, de l’igname, du gombo et de plusieurs autres cultures vivrières locales.
Le site du projet de Dominion Farms est situé dans la communauté de Gassol, à l’intérieur de la zone de gouvernement local de Gassol. Les terres que l’entreprise a acquises sont des terres communautaires qui ont été cédées à l’UBRBDA (Upper Benue River Basin Development Authority), un organisme du gouvernement fédéral du Nigeria, en 1978.
Les 38 000 ha gérés par l’UBRBDA, qui bordent les rives de la Taraba, sont cultivés chaque année par environ 10 000 agriculteurs locaux. Les informations recueillies auprès du Bureau des terres et du cadastre (Bureau for Land and Survey) de l’État de Taraba indiquent que jusqu’à 45 000 personnes bénéficient de l’utilisation de ces terrains. Par ailleurs, il existe au moins 3 000 détenteurs de titres fonciers à l’intérieur de la zone de l’UBRBDA.
L’UBRBDA a construit d’importantes installations et réalisé des travaux d’irrigation pour faciliter l’utilisation de ces terres, notamment des logements pour le personnel de l’UBRBDA, une station de traitement des eaux, des routes d’accès, un talus de protection de 8 km pour la lutte contre les inondations, un entrepôt, une installation de stockage et une maison d’hôtes.
Des agriculteurs expulsés de leurs terres
Le protocole d’accord entre le ministère fédéral de l’Agriculture et du Développement rural, le gouvernement de l’État de Taraba et Dominion Farms Ltd a été signé sans consultations adéquates avec les communautés concernées. Les consultations qui ont eu lieu ont fait intervenir principalement des responsables publics. Les informations que les populations locales ont reçues à propos du projet étaient insuffisantes et ont été présentées de façon partiale en faveur du projet. On n’a jamais demandé aux agriculteurs locaux s’ils étaient d’accord avec le projet ou dans quelles conditions ils l’accepteraient, et ils ont donc été écartés d’une décision qui a un impact majeur sur leurs vies.
L’accord a aussi été signé sans évaluation de l’impact social et environnemental. Il ne comportait pas de plan de réinstallation pour les agriculteurs concernés.
Jusqu’à présent, les engagements pris pendant le processus d’attribution des terres à Dominion Farms pour améliorer les moyens de subsistance des agriculteurs locaux de Gassol ne se sont pas concrétisés. Il n’y a eu aucune construction de routes, d’hôpitaux, de centres de formation ou d’école, et l’entreprise n’a pas embauché d’habitants de la communauté locale.
Les familles, qui cultivent les terres acquises par Dominion Farms et y vivent depuis des générations, sont indignées et désabusées. Elles disent que ce projet va enfreindre leur droit à une alimentation et à des moyens de subsistance suffisants et enfreindre leur droit d’accès aux terres. Elles considèrent qu’il s’agit d’une éviction forcée sans consultation adéquate ni indemnisation.
Plusieurs agriculteurs ont déclaré que Dominion Farms exerçait sur eux des pressions indues pour qu’ils quittent les parcelles de terre qu’ils cultivaient. Dominion Farms n’a pas commencé de production importante sur les terres qui lui ont été accordées, mais l’entreprise a comblé des étangs et des canaux dont les populations locales sont dépendantes pour la pêche et ont mis en place des agents de sécurité dans la zone pour empêcher les agriculteurs d’accéder à leurs terres. Les populations ont été également obligées d’arrêter la pâture de leurs chèvres et de leurs vaches sur les terres occupées par Dominion Farms. Tout cela a un impact très important sur les moyens de subsistance des populations.
Les populations locales sont également inquiètes du fait que Dominion Farms ne fournit pas aux agriculteurs les services et l’appui technique que leur fournissait auparavant l’UBRBDA et ils craignent que les installations ne se dégradent si elles ne sont pas correctement entretenues. Elles ont protesté auprès des autorités mais, pour le moment, aucune mesure n’a été prise, que ce soit au niveau des autorités locales ou de celles de l’État ou de la Fédération.
Points de vue des responsables politiques :
Le 9 juin 2014, les chercheurs de l’ERA et du CEED ont rencontré M. Abdulahi, le responsable du bureau local de l’UBRBDA (Upper Benue River Basin branch Office) à Jalingo. Il a confirmé que l’UBRBDA était informée du projet avec Dominion Rice Integrated Farms Ltd. Il a fait un rappel historique de l’UBRBDA dans la communauté de Gassol et donné une présentation générale de l’appui technique et du renforcement des capacités que l’Autorité fournit aux agriculteurs. Selon lui, l’UBRBDA n’a pas constaté pour le moment que le projet de Dominion Farms avait apporté des bénéfices tangibles aux agriculteurs.
M. Abdulahi a expliqué que, à son avis, le protocole d’accord avec Dominion Farms était incorrect parce que le ministère des Ressources en eau, qui supervise l’UBRBDA, n’avait pas été associé. Il a précisé que les terrains concernés font partie des 38 000 ha de terres cédés à l’UBRBDA en 1978 et qu’il a fallu consacrer d’énormes sommes d’argent public pour aménager les terres et aider les agriculteurs locaux, par exemple à travers une assistance technique et la construction de routes, un bureau local, une station de traitement des eaux, un atelier, un entrepôt et une centrale électrique.
L’ERA et le CEED ont également rendu visite au ministère d’État de l’Agriculture et des Ressources naturelles. Comme l’Honorable Commissaire et le Secrétaire permanent n’étaient pas disponibles lors de nos deux tentatives de visite au ministère, l’ERA et le CEED ont rencontré à la place le Responsable technique chargé du projet Dominion Farms, Alhaji Musa Umar, qui est également Directeur principal au ministère.
M. Umar a expliqué que la mission du ministère était de créer un environnement favorable aux investissements agricoles dans l’État de Taraba, de façon à contribuer à la production alimentaire et à réduire autant que possible la proportion des produits alimentaires importés. Selon lui, « le projet de Dominion Farms correspond à ce que l’État cherche à faire depuis des années ».
M. Umar a continué d’affirmer que le projet aidera l’État de Taraba à réduire ses importations de riz et lui permettra d’exporter vers les pays voisins. Il a cité en exemple les activités de Dominion Farms au Kenya, où cette entreprise a été capable de produire du riz pour l’exportation en utilisant seulement 7 000 ha.
M. Umar a affirmé clairement que Dominion Farms a reçu un Certificat d’occupation et a démarré ses activités dans la communauté de Gassol. Il a expliqué que l’État peut potentiellement céder deux millions d’hectares mais n’en a cédé que 30 000.
M. Umar a également fait remarquer que toutes les dispositions nécessaires avaient été prises par l’État pour verser une indemnisation aux communautés qui accueillent le projet. Il a indiqué que le Bureau des terres et du cadastre a procédé à l’évaluation nécessaire et est arrivé à un plan cadastral, et a soumis un rapport à l’attention du gouvernement de l’État. Il a précisé que la somme figurant dans le rapport d’évaluation était énorme et que l’État avait donc décidé verser une indemnisation aux communautés en plusieurs versements.
M. Umar a ajouté que l’État prenait actuellement des dispositions pour construire de grandes routes dans Gassol, comme prévu dans le Protocole d’accord. Des dispositions ont aussi été prises pour permettre aux agriculteurs de travailler avec Dominion Farms de façon à pouvoir récolter suffisamment de céréales pour nourrir leurs familles.
La principale préoccupation du ministère, a-t-il indiqué, était que Domnion Farms soit en mesure de réaliser son travail de façon à développer la production de riz et de poisson pour faire de Taraba un État exportateur de riz. Il a affirmé que les agriculteurs locaux seraient associés au processus agricole au fur et à mesure de l’avancement du projet de Dominion Farms.
Points de vue des communautés et des agriculteurs locaux
Les 10 et 11 juin 2014, l’ERA et le CEED ont organisé deux grandes réunions dans la communauté de Gassol avec des agriculteurs locaux et des responsables d’organisations d’agriculteurs. Les populations de la communauté de Gassol étaient très heureuses de cette visite et voulaient transmettre des informations sur la situation difficile dans laquelle elles se trouvaient et sur les souffrances auxquelles elles étaient confrontées du fait de l’arrivée de Dominion Farms dans leur communauté.
On trouvera ci-dessous quelques citations d’agriculteurs locaux qui se sont exprimés pendant ces réunions.
« Nous avons été heureux de savoir que Dominion Farms allait venir, sans savoir que c’était pour l’intérêt égoïste de quelques membres du gouvernement de l’État et du gouvernement fédéral, et des étrangers qui assurent la direction de Dominion Farms. Notre terre est très riche et très fertile. Nous pratiquons ici toutes sortes de cultures, comme le riz, les haricots, le sorgho, le manioc, les fèves de soja, le millet, l’igname ainsi que la pisciculture et l’élevage des chèvres, des moutons et des vaches. Mais depuis que les gens de Dominion Farms sont arrivés avec leurs machines et une partie de leur matériel de travaux, on nous a demandé d’arrêter nos travaux agricoles et même de quitter nos terres puisque la totalité a été cédée au projet de Dominion Farms. Certains des agriculteurs possédaient des tracteurs privés qu’ils utilisaient pour leurs travaux agricoles, indépendamment des équipements d’Upper River Basic qui sont encore en place. »
– Mallam Danladi K Jallo
« Au cours des deux dernières années, l’ancien Président Olusegun Obasanjo, le gouvernement de l’État de Taraba et Dominion Farms ont démarré la totalité du processus. Des relevés topographiques ont maintenant été réalisés sur les terres et la totalité du dispositif a été approuvée par le gouvernement de l’État de Taraba. Le gouvernement a accordé à Dominion Farms un Certificat d’occupation qui a automatiquement donné à Dominion Farms le droit de prendre le contrôle des terres et on nous a empêché de poursuivre nos activités agricoles sur les terres. »
– Alhaji Muhammed Bulama
« Nous parlons d’une seule voix contre Dominion Farms parce que nous nous opposons à leurs activités. Nous avons sur ces terres les étangs piscicoles que nous avons hérités de nos aïeux, mais Dominion Farms a annoncé qu’il allait tous les combler de sable pour avoir plus de place pour faire ses cultures. Quand nous avons commencé à travailler sur les terres, ils sont venus avec le personnel de sécurité à qui Dominion Farms avait donné pour mission d’expulser tous les agriculteurs qui travaillaient sur leurs terres. »
– Alhaji Mairiga Musa
« Nous avions tous l’intention d’écrire au gouvernement de l’État. Nous étions prêts à faire des manifestations pacifiques, à dialoguer et même à crier au monde entier juste pour entendre leurs voix, les voix de pauvres agriculteurs innocents. Mais même si aucune de ces stratégies ne fonctionne, nous pouvons tout de même nous mobiliser contre Dominion Farms, pour notre terre, la terre de nos ancêtres, avec nos familles, et rester là jusqu’à ce qu’ils nous répondent. Nous faisons campagne pour engager une action juridique contre Dominion Farms et le gouvernement. »
– Mallam Ismaila Gebi
« Nous ne cautionnons pas un système d’exploitation agricole étranger dont nous ne connaissons rien. Ils sont venus ici pour cultiver. La seule chose qu’on nous dit c’est que notre terre nous est retirée et sera donnée à quelqu’un d’autre. Nous n’avons été associés à aucun niveau. Au nom de notre avenir et de nos enfants, nous exigeons des autorités gouvernementales qu’elles demandent à Dominion Farms de ne pas toucher à nos terres. »
– Rebecca Sule (Mama Tina)
Conclusions
Le projet de Dominion Farms dans le Taraba est un exemple clair de la façon dont l’accaparement des terres vole aux populations leur accès à la terre et à l’eau et porte atteinte à leurs moyens de subsistance et à leur sécurité alimentaire.
Les agriculteurs de la Communauté de Gassol ont été placés dans une position très difficile. Ils sont actuellement expulsés de leurs terres et coupés de l’accès à l’eau dont ils ont besoins pour leur subsistance et nourrir leurs familles. Malgré les pressions provenant des différents niveaux du gouvernement et de l’entreprise, les agriculteurs avec lesquels l’ERA et le CEED ont discuté ont dit qu’ils ne céderaient pas leurs terres à Dominion Farms. Ils disent qu’ils vont recourir à des actions juridiques et à des actions de protestation et des manifestations pacifiques pour essayer de bloquer le projet.
Les besoins de la communauté doivent être privilégiés par rapports aux profits de Dominion Farms. Les terres doivent rester entre les mains des agriculteurs locaux qui exploitent ces terres depuis des générations pour fournir des produits alimentaires aux populations de l’État de Taraba.